TEXTE DE PRESENTATION DE L’EXPOSITION EUROMED DANS LE CADRE DE 9PH A LYON

Le travail d’Alain Sauvan s’identifie par une démarche exclusivement centrée sur la photographie de paysages architecturaux et plus particulièrement sur les lieux de l’industrie. Depuis 2007, il photographie des sites tels que l’étang de Berre, le pôle industriel de Martigues et la zone Euro méditerranée à Marseille.
L’exposition Euromed présente une série de photographies en noir et blanc. Toutes du même format et du même cadrage, ces photographies révèlent le travail topographique des quartiers de la Joliette et d’Arenc à Marseille. Alain Sauvan explore des territoires non autorisés aux publics, des territoires interdits. Ce sont des chantiers, des sites en destruction, en reconstruction, où l’on efface l’histoire passée d’un quartier pour laisser place à une réhabilitation d’abord architecturale puis humaine. Au fil de ses déambulations, Sauvan apprivoise des paysages urbains en mutation où la présence humaine n’est plus mais n’est pas exclue. Les images laissent entrevoir des traces, des strates d’humanité, un passage, un temps vécu et un possible avenir. Une évolution.
Ces territoires en mouvement retiennent l’attention d’Alain Sauvan grâce à leurs particularités architecturales. Les paysages industriels répondent à une exigence essentielle du photographe qui est celle du sujet. Il s’approprie ces lieux pour proposer des images qui mettent en exergue une interprétation et une vision personnelle de la réalité. Le réalisme de ses images prend une nuance insolite et déroutante où l’architecture est un prétexte. Elle est traitée comme un motif graphique pour composer des images fortes d’esthétisme.
Par l’acte photographique qui est un moyen d’appréhender le monde, Sauvan parvient à s’approprier le réel. Un réel que nous connaissons en théorie : celui que l’on a sous nos yeux, celui que l’artiste voit. Un réel reconnu qui figure cependant une autre réalité : une réalité réappropriée, représentée puis finalisée par l’objet démonstratif d’un regard unique qui est l’image.

En noir et blanc ou en couleur, les photographies sont des images singulières où la lumière est de mise. S’y ajoute un travail de composition qui prend tout son sens. Lignes, formes géométriques, plans et espaces, traits, contrastes, jeux d’ombres et de lumières sont autant d’éléments plastiques dominants de ces images. Ce sont des éléments qui rejoignent les forces de la plastique pure, qui permettent d’aborder les images d’un point de vue «presque» abstrait. Par le biais d’un travail esthétique et d’un regard pictural, Alain Sauvan s’éloigne de la photographie documentaire pour se rapprocher de la photographie plasticienne. Photographe de l’entre-deux, ses interventions photographiques privilégient une représentation non idéalisée de la nature pour produire des photographies de territoires doublement réinventés.
Marie-Agnès Charpin   Commissaire de l’exposition – 2012